Les guerres israélo-arabes (1948-1973)

Introduction

Les guerres israélo-arabes (1948; 1956; 1967; 1973) furent des conflits majeurs entre l’État d’Israël et ses voisins arabes, entrecoupés de nombreuses perturbations mineures, qui au final ponctuèrent plusieurs décennies d’antagonismes au Proche et Moyen-Orient. Dès le début de l’immigration juive en Palestine dans les années 1930, les Juifs et les Arabes furent en conflit sur l’enjeu d’une terre que chaque religion en présence considère comme sacrée. Notons aussi que les années séparant les guerres à grande échelle de 1948 à 1973, puis celles depuis 1973, virent une agitation relativement continue de la part des rebelles palestiniens désireux d’employer tous les moyens jugés nécessaires afin d’établir un État palestinien indépendant. Cela étant, ces événements combinés firent de cette région l’une des plus instables du monde.

1948

Tant les Arabes que les Juifs avaient des réclamations, voire des prétentions historiques sur ce territoire que l’on appelle la Palestine, de même que sur la cité sacrée de Jérusalem. Après un long exil, les Juifs commencèrent à réaliser leur vieux rêve d’immigrer sur ces terres qui furent alors sous la tutelle britannique au cours des années 1930. Par contre, ce fut surtout au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans le contexte des horreurs de l’Holocauste, que les Juifs de par le monde furent convaincus que seul un État juif indépendant pourrait assurer leur avenir et celui de leur religion.

Par conséquent, les immigrants juifs vers la Palestine arrivèrent par dizaines de milliers, si bien que la population juive de Palestine se chiffra à 650,000 personnes en 1948, malgré les tentatives des Britanniques de limiter, voire stopper cette immigration de masse. Dans ce contexte, certains militants juifs commencèrent à attaquer les garnisons britanniques et à se battre contre les Palestiniens, qui furent loin de bien accueillir ces immigrants soucieux d’établir un État indépendant juif dans cette région.

Des soldats arabes en 1948.

Incapable de garder le contrôle sur cette situation hautement volatile, la Grande-Bretagne décida de confier le problème à l’Organisation des Nations-Unies (ONU) nouvellement créée, dans le but de trouver une solution pacifique. Le 29 novembre 1947, l’Assemblée Générale des Nations-Unies ratifia un plan de partition de la région en deux États, l’un juif et l’autre palestinien. Bien accueilli par les Juifs de la région, ce plan de partition fut dénoncé et qualifié d’inacceptable par les Palestiniens et les gouvernements des États arabes limitrophes, ce qui amena ces États à faire des préparatifs de conquête militaire de la Palestine.

En prévision du conflit, les Israéliens accumulèrent des stocks considérables d’armes de toutes sortes, soit un matériel militaire qu’ils parvinrent à se procurer en bonnes quantités sur le marché noir au lendemain de la guerre en Europe, de même qu’ils entraînèrent des hommes, toujours en prévision des hostilités contre les voisins arabes. En fait, chaque camp n’eut guère de difficultés à recruter, dans la mesure où les armées purent combler leurs effectifs, entre autres, grâce à l’afflux de vétérans de la guerre de 1939-1945, dont nombreux étaient ceux ayant servi dans les rangs britanniques.

Des soldats israéliens lèvent leur drapeau national en 1948: c'est la déclaration d'indépendance.

Après l’annonce de la résolution onusienne de novembre 1947, de violentes et sanglantes émeutes, de même que des attaques au style terroriste, balayèrent la région au moment où chaque camp tenta d’acquérir des parcelles de territoire avant l’annonce de la partition officielle. Les forces britanniques, qui officiellement administrèrent la Palestine, tentèrent tant bien que mal de contenir ces violences, mais elles ne voulurent commettre aucun geste brusque qui aurait pu être interprété comme une prise de position partiale envers un camp au détriment de l’autre. Au moment où la date butoir d’application de la résolution onusienne approcha, les Britanniques procédèrent à un repli systématique de leurs troupes en Palestine, laissant la région dans un véritable chaos. Sans attendre l’entrée en vigueur de la partition, les dirigeants juifs prirent, pour leur part, la décision de déclarer l’indépendance d’Israël le 14 mai 1948.

Quant aux dirigeants palestiniens, ceux-ci refusèrent de reconnaître cette nouvelle nation juive et ils lui déclarèrent la guerre presque immédiatement. Six nations arabes (Égypte, Syrie, Transjordanie, Liban, Irak et Arabie Saoudite) s’allièrent et envoyèrent leurs soldats écraser cet État naissant dans ce qui fut appelé ultérieurement la Guerre israélo-arabe de 1948. En dépit de ses nets désavantages militaires, tant en hommes qu’en matériel, les forces israéliennes de défense parvinrent non seulement à survivre, mais aussi d’étendre le contrôle juif sur une plus large part de la Palestine. En ce sens, les Israéliens furent aidés par deux trêves concoctées par l’ONU qui accordèrent à chaque camp un temps de répit et pour se réarmer. Finalement, la pression internationale contraignit les belligérants à conclure un armistice qui fut signé au début de 1949. L’Égypte fut la première à le signer le 24 février et le tout se conclut le 20 juillet lorsque la Syrie accepta à son tour de cesser les hostilités.

Ces accords laissèrent Israël en contrôle d’un territoire beaucoup plus vaste que ce que prévoyait la résolution onusienne, en plus de 800,000 Palestiniens désormais sous administration israélienne. Cette première campagne militaire réussie permit à Israël de mettre sur pied une armée de métier, en plus de procéder à l’acquisition de matériel militaire de la France et d’autres nations occidentales. Dans l’autre camp, de nouveaux dirigeants firent leur apparition, dont le plus notable peut-être, l’Égyptien Gamal Abdel Nasser.

Des réfugiés arabes marchent sur une route du nord d'Israël vers le Liban (novembre 1948).

1956

Ces nouveaux chefs qui prirent le pouvoir dans les nations arabes se trouvèrent du coup rejetés par les puissances de l’Ouest et courtisés par l’Union soviétique, dans le contexte de la Guerre froide grandissante entre les blocs idéologiques. Alors que l’Union soviétique fournissait une aide militaire aux nations arabes, celles-ci en retour fournirent des appuis de toutes sortes à la résistance palestinienne et encouragèrent par le fait même un nationalisme panarabe en pleine croissance.

Dans cette optique, en 1956, Nasser provoqua une confrontation directe avec la France et la Grande-Bretagne en s’emparant du stratégique canal de Suez et coupant du même coup l’accès d’Israël à la Mer Rouge. Fort des encouragements franco-britanniques, Israël envahit la péninsule du Sinaï le 29 octobre de la même année et ses troupes reçurent des renforts appréciables des contingents français et britanniques débarqués dans la région. Ces forces combinées parvinrent rapidement à vaincre les troupes égyptiennes, si bien qu’elles purent contrôler toute la péninsule, du moins pour une courte période de temps. En effet, les vainqueurs ne purent savourer bien longtemps leur victoire, car la pression exercée par les États-Unis et la menace d’intervention soviétique forcèrent le retrait des forces d’invasion, et ce, moins d’un mois après le début des hostilités. Cette seconde guerre israélo-arabe pour le canal de Suez et le Sinaï s’avéra être un conflit sans réel lendemain, dans la mesure où il fit peu afin de solidifier la solidarité arabe, tout en alignant ces pays dans le camp soviétique.

Mieux équipée qu'en 1948, l'armée israélienne qui entame sa seconde guerre avec ses voisins arabes en 1956 se voyait fournie d'un important armement en blindés et avions de combat.

1967

Au cours de la décennie suivante, l’Union soviétique encouragea et appuya les développements militaires dans les nations arabes qui entouraient Israël. L’armée israélienne fit de même, notamment en mettant l’accent sur le développement d’une puissante force blindée et d’une aviation à toute épreuve. L’armée et le gouvernement israéliens interprétaient la montée en puissance des pays arabes comme une menace sérieuse, d’autant que les services de renseignements attestaient tous d’une autre imminente offensive contre l’État hébreu.

En conséquence, Israël mobilisa discrètement les unités de réserve de son armée puis, le 5 juin 1967, lança une attaque préventive contre l’aviation égyptienne. Au cours des deux journées suivantes, les forces israéliennes décimèrent les troupes égyptiennes, capturèrent la Bande de Gaza et à nouveau la péninsule du Sinaï. L’assistance fournie à l’Égypte par le Liban, la Jordanie, la Syrie et l’Irak s’avéra inefficace, car Israël avait pris soin d’éliminer rapidement les armées de l’air de ses ennemis. Lorsque Gaza et le Sinaï furent sécurisés, Israël tourna son attention vers la Jordanie et la Syrie. Au cours des quatre derniers jours dans ce qui sera appelé plus tard la Guerre des Six Jours, Israël s’empara de la Cisjordanie, du plateau du Golan et des secteurs de Jérusalem autrefois sous contrôle arabe.

L'offensive aérienne surprise d'Israël contre l'Égypte de juin 1967 permit de détruire la presque totalité de l'aviation égyptienne qui se trouvait toujours au sol.

Malgré ses succès, Israël se retrouva vite condamné par la communauté internationale après sa Guerre des Six Jours, parce que ses offensives apparaissaient aux yeux de plusieurs comme de purs actes d’agression, surtout lorsque l’on considère l’ampleur des gains territoriaux à la fin de ces brèves hostilités. L’Union soviétique ne cacha pas son appui renouvelé aux nations arabes défaites, s’attardant ainsi à refaire leurs forces militaires. À leur tour, les nations arabes réitérèrent leur appui à la résistance palestinienne, notamment à l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) alors dirigée par Yasser Arafat, un mouvement qui mena de nombreuses attaques terroristes en Israël et ailleurs dans le monde contre les intérêts juifs. Tout de même, Israël devait constamment sous-peser le degré de menace que représentaient ses voisins arabes, même si les dirigeants de ces nations n’affichaient plus la même unité, qu’ils avaient perdu d’importants territoires et trois guerres successives.

1973

Deux généraux israéliens d'expérience: Moshe Dayan et Ariel Sharon, lors de la guerre du Yom Kippour (1973).

Les nations arabes choisirent d’attaquer à nouveau Israël lors du congé férié du Yom Kippour, le 6 octobre 1973. Lancées simultanément de l’Égypte et de la Syrie, ces offensives prirent les forces israéliennes par surprise, leur infligeant de lourdes pertes lors des premières journées d’engagement. Conséquemment, les forces arabes connurent certains succès, reprenant entre autres une large partie du Sinaï au sud et du plateau du Golan au nord. Les choses commencèrent à tourner à la faveur des Israéliens le 10 octobre alors qu’une série de contre-attaques parvinrent à repousser les forces syriennes dans leurs pays, comme elles arrêtèrent également les Égyptiens sur la portion sud de la ligne de front.

Les États-Unis et l’Union soviétique répondirent à la crise en ravitaillant leurs alliés respectifs par la voie des airs. De plus, les Américains déployèrent trois groupes de porte-avions et mirent en état d’alerte maximale leur Strategic Air Command. Quant aux Soviétiques, ceux-ci menacèrent d’envoyer des troupes dans la région et placer leurs forces aériennes en état d’alerte. Dans le but d’éviter que ce nouveau conflit israélo-arabe ne dégénère en confrontation nucléaire entre les superpuissances, les diplomates s’activèrent frénétiquement afin de trouver une issue politique qui sache ramener la paix.

Leurs efforts prirent de plus en plus d’importance le 21 octobre, lorsque les troupes israéliennes traversèrent le canal de Suez et parvinrent à encercler la 3e Armée égyptienne. Devant la situation, l’Union soviétique réitéra sa menace d’envoyer des troupes pour secourir cette armée égyptienne, ce qui n’aida en rien les diplomates dans leurs tentatives de localiser le conflit et ramener la paix. Cependant, les diplomates purent conclure deux cessez-le-feu. Le premier échoua, mais le second put tenir jusqu’à la conclusion des hostilités le 25 octobre. Lors de ces deux semaines d’affrontements, les pertes totales arabes s’élevèrent à 8,500 hommes contre 6,000 pour les Israéliens. Ajoutons à cela les pertes financières considérables qu’encaissa chaque camp, des sommes qui pourraient avoisiner l’équivalent du PIB au cours d’une année.

Des soldats égyptiens posent pour la caméra sur le toit d'un bunker situé sur la ligne Bar-Lev, quelque peu à l'est du canal de Suez (1973).

La guerre du Yom Kippour convainc Israël d’être plus flexible dans ses négociations avec les États arabes. À titre d’exemple, une initiative américaine amena la signature des accords de Camp David en 1978 dans lesquels Israël rendit la péninsule du Sinaï à l’Égypte en retour de la reconnaissance égyptienne du droit d’exister de la nation juive. Le retrait de la menace égyptienne mit effectivement fin aux guerres israélo-arabes à grande échelle, du moins jusqu’au moment d’écrire ces lignes, mais le conflit dans la région perdure. Rappelons l’invasion par Israël du Liban en 1982, dans le but d’éliminer les bases de l’OLP en ce pays. Les troupes syriennes, qui occupaient la moitié nord du Liban, opposèrent une résistance à l’invasion, mais elles furent défaites. En conséquence, Israël maintint une force militaire d’occupation au Liban, tout en supportant des groupes paramilitaires chrétiens jusqu’en 2000.

Conclusion

Israël et l’OLP conclurent une entente en 1993 dans le cadre des accords d’Oslo, qui étaient censés fournir une base pour la négociation d’une paix permanente. Israël consentit à la création d’un État palestinien, de même qu’à une Autorité palestinienne dirigée par Arafat. Situé en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza, sur des terres conquises par Israël lors de la guerre des Six Jours en 1967, le nouvel État palestinien ne fut doté que d’une autonomie limitée qui n’apporta pas une paix, ni une indépendance totale aux Palestiniens. Ironiquement, des attaques par des extrémistes des deux camps tuèrent davantage de personnes dans les huit années suivant la signature des accords d’Oslo que lors, par exemple, des quinze années qui les précédèrent depuis Camp David.

L'évolution des gains et des pertes de territoires dans le contexte des guerres israélo-arabes depuis 1948.

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