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La guerre d’indépendance des États-Unis (1775-1783): Première partie

Introduction

La guerre d’indépendance américaine de 1775 à 1783, qui fut le premier conflit colonial ayant amené la fondation de la première république moderne, les États-Unis, débuta dans le contexte d’une lutte visant la préservation des droits des Américains à l’intérieur de l’Empire britannique. Certains intellectuels de l’époque, entre autres Tom Paine, l’auteur de Common Sense (1776) et The Rights of Man (1791-1793), croyaient que la Révolution américaine avait fait davantage que n’importe quel autre conflit de l’Histoire afin d’illuminer le monde et amener l’humanité vers la modernité.

Cela étant, la guerre d’indépendance des États-Unis s’avéra être un « petit conflit » en comparaison de la Révolution française ou des guerres napoléoniennes qui s’ensuivirent. Elle fut néanmoins la plus longue des guerres menées par l’Amérique avant celles du Vietnam et de l’Afghanistan, comme elle fut le conflit domestique le plus coûteux en vies humaines avec la Guerre civile (1861-1865). Par conséquent, les premiers coups de feu furent tirés simultanément à Lexington et à Concord au Massachusetts, le 19 avril 1775, après onze années de tensions politiques entre l’Angleterre et ses treize colonies d’Amérique quant à la nature des rapports impériaux.

Les causes du conflit: l’accumulation de tensions

Les causes profondes du conflit entre l’Angleterre et ses colonies tirent leurs racines des victoires britanniques lors de la Guerre de Sept Ans (1756-1763), et particulièrement face à la forte dette nationale contractée par ces succès, de même que par les tentatives de l’Angleterre de faire payer à ses colonies de nouvelles taxes afin de balancer ses livres. À cela, il faut ajouter la décision de Londres de stationner en permanence dans ses colonies une force militaire régulière de 10,000 soldats, qu’il fallait naturellement payer, ce qui ne fit qu’accroître les ressentiments et les craintes des habitants. Par ailleurs, la tentative de l’administration du premier ministre George Grenville (1763-1765) de taxer l’Amérique engendra une forte opposition dans les colonies, de même que des émeutes en plusieurs endroits.

L'une des causes importantes à l'origine de la révolution américaine réside dans les succès britanniques lors de la Guerre de Sept Ans. L'Angleterre voulut faire payer à ses colonies d'Amérique une large part des dettes contractées afin de renflouer le trésor public.

À cet effet, le vote par le parlement britannique des Townshend Duties (Townshend Acts) en 1767 se voulait une autre tentative de Londres d’accroître les revenus de l’administration coloniale et ainsi affermir l’autorité royale en faisant payer aux colons les salaires des juges et des fonctionnaires chargés d’administrer les territoires. Non sans surprise, les réactions de fureur furent immédiates, du moins dans une partie de l’opinion publique coloniale. L’année suivante, Londres prit une autre décision, celle de stationner des soldats réguliers dans Boston, qui était alors l’épicentre de l’opposition coloniale aux nouvelles lois et taxes britanniques, ce qui ne fit qu’envenimer une situation déjà tendue. La conséquence immédiate fut le Massacre de Boston du 5 mars 1770, dans lequel la garnison britannique ouvrit le feu contre la foule, tuant cinq colons et en blessant huit autres, sans compter l’onde de chocs que cet incident provoqua dans l’ensemble des colonies. Comme si cela n’était pas assez, l’administration du premier ministre Lord North voulut augmenter ses revenus en levant une autre taxe sur le thé, le Tea Act de 1773, ce qui amena le célèbre incident du Boston Tea Party le 16 décembre de la même année, où des colons jetèrent par-dessus bord des cargaisons de ces précieuses feuilles. Cette fois, l’incident créa une autre onde de choc, en Angleterre.

Déterminé à faire de Boston un exemple, le parlement britannique s’empressa de faire voter quatre « Actes coercitifs » (Coercive Acts) dans l’espoir d’intimider l’opposition coloniale et ainsi raffermir l’autorité royale. Considérées en Amérique comme des « Actes intolérables » (Intolerable Acts), ces lois punitives de Lord North avaient pour but, comme nous l’avons mentionné, de mater l’opposition coloniale en faisant de Boston et du Massachusetts des exemples. Dans ce contexte houleux, la nomination d’un Britannique, le lieutenant-général Thomas Gage commandant des forces britanniques d’Amérique, au titre de gouverneur du Massachusetts fut interprétée comme un indice clair des desseins tyranniques de Londres visant à restreindre les libertés des colons de disposer d’un gouvernement autonome.

L'incident du Boston Tea Party de décembre 1773 fut symbolique de l'accumulation des tensions entre l'Angleterre et ses colonies américaines quant à la nature des rapports impériaux autour de la question de la taxation et de l'administration coloniales.

Moins d’une année après l’incident du Boston Tea Party, une première opposition unifiée et en apparence organisée s’exprima lors d’une rencontre du Premier Congrès continental à Philadelphie en septembre 1774. Face à cette opposition grandissante, l’administration de Lord North mit de la pression sur le général Gage afin que celui-ci place en état d’arrestation les dirigeants de l’opposition. Cela explique en partie les accrochages de Lexington et Concord évoqués précédemment, car la milice du Massachusetts refusa de se laisser intimider par une démonstration en force des soldats réguliers britanniques, puis par celle de l’autorité royale qui tenta de reprendre le contrôle de la situation.

En juin 1775, d’importants renforts britanniques débarquèrent à Boston avec à leurs têtes les généraux Sir William Howe, John Burgoyne et Sir Henry Clinton. Pour sa part, et devant la montée inexorable des tensions, le Second Congrès continental, réuni à Philadelphie le 10 mai de la même année, décida d’opposer une résistance militaire. C’est alors que la décision fut prise de nommer George Washington, un colonel de la milice de Virginie, à la tête des forces qui iraient faire le siège de Boston le 15 juin. Les tentatives de trouver un règlement politique à la crise furent anéanties le 23 août 1775, lorsque le roi George III proclama que les treize colonies étaient en état de rébellion.

La guerre d’indépendance des États-Unis était officiellement commencée.

Carte des principaux théâtres d'opérations de la guerre d'indépendance américaine. (Cliquez pour agrandir.)

Les premiers affrontements: essais et erreurs (1775-1776)

Alors que les forces américaines entourant Boston commencèrent à s’enterrer sur les hauteurs avoisinantes de la péninsule de Charlestown qui surplombent Boston, une force composée de volontaires coloniaux sous les ordres d’Ethan Allen et Benedict Arnold s’empara du fort de Ticonderoga et de New York (et ses précieux canons), le 10 mai 1775. Croyant de leur côté qu’une démonstration de force en règle suffirait à mater la rébellion, les généraux britanniques dans Boston décidèrent de lancer un assaut frontal classique contre l’un des points stratégiques des hauteurs entourant la ville, vers Breed’s Hill. La bataille qui s’ensuivit, qu’on appelle souvent par erreur la bataille de Bunker Hill (17 juin 1775), s’avéra être une importante bévue propagandiste pour l’Angleterre. En effet, au cours de trois assauts dirigés séparément contre ces hauteurs, l’infanterie britannique parvint à prendre ses objectifs, mais au prix de pertes frôlant les 50% des effectifs engagés.

Représentation de l'infanterie britannique à l'assaut de Bunker Hill, le 17 juin 1775. Premier engagement majeur de la guerre, Bunker Hill fut une victoire britannique, mais l'infanterie d'assaut subit de lourdes pertes, ce qui inquiéta assurément le haut commandement pour les batailles à venir.

En conséquence, la gaffe propagandiste résultant de cette bataille est double. D’une part, le Congrès américain en appela de tous les hommes jugés aptes au service à joindre les rangs de la milice, ce qui divisa les Américains en deux camps, celui des patriotes et celui des loyalistes. D’autre part, cette sanglante bataille fit réaliser aux officiers britanniques que la suppression de la rébellion montante sera beaucoup plus difficile que ce qui fut initialement envisagé. Le général Gage fut démis de son poste en octobre 1775, pour être remplacé par Sir William Howe, qui décida aussitôt d’évacuer Boston. Le 17 mars suivant, ce général prit la stratégique décision d’évacuer ses forces régulières et partisanes loyalistes vers Halifax, en Nouvelle-Écosse, laissant ainsi aux troupes de Washington le contrôle de Boston.

Réalisant que l’autorité britannique dans les autres colonies était sur le point de s’effondrer, le Congrès américain autorisa une invasion du Canada sous les ordres de deux des généraux de la nouvelle Armée Continentale, Richard Montgomery et Benedict Arnold. Alors que l’hiver tomba dru, l’attaque américaine contre la ville de Québec fut repoussée par le général Guy Carleton en décembre 1775, puis les Britanniques contre-attaquèrent avec une invasion de la colonie de New York lors de la bataille de l’île Valcour en octobre 1776. D’autres tentatives britanniques de rétablir l’autorité royale ne furent guère couronnées de succès. Les Britanniques furent défaits à Moore’s Creek en Caroline du Nord (27 février 1776) ainsi qu’à Charleston en Caroline du Sud, où le colonel William Moultrie assuma avec cran la défense de Fort Sullivan (28 juin 1776) face à un important débarquement naval sous les ordres de Lord Cornwallis et Sir Henry Clinton.

La révolution américaine se transporta brièvement au Canada, où les troupes du Congrès tentèrent en vain de s'emparer de la ville de Québec alors défendue par les Britanniques du général Carleton, assistés par des éléments de la milice locale (décembre 1775).

Cette série de défaites fit réaliser au haut commandement britannique que son action de police devrait être transformée en une campagne militaire d’envergure et y consacrer les ressources conséquentes pour reconquérir le continent. Le parlement britannique autorisa la levée d’un contingent de 55,000 hommes pour servir exclusivement en Amérique. Or, il s’avéra que le recrutement volontaire pour cette campagne impopulaire en Angleterre n’alla pas aussi bien que prévu, ce qui contraignit le parlement à embaucher des troupes mercenaires provenant pour l’essentiel des États allemands. Le plus important contingent germanophone fut levé en Hesse-Cassel, si bien que ces « Hessois » (comme on les appelait) représentèrent jusqu’à 33% des forces britanniques servant en Amérique en 1778 et 1779.

Représentation de soldats allemands combattant pour l'Angleterre. Les Britanniques eurent recours à ces mercenaires, particulièrement lors des premières années du conflit.

Notons aussi que ce recrutement de soldats supplémentaires fit en sorte qu’en août 1776, le général Howe avait à sa disposition la plus grande force militaire servant en dehors des îles Britanniques au cours du XVIIIe siècle. Dans le but d’accroître ces effectifs, les Britanniques recrutèrent également quelque trois cents compagnies de loyalistes tout au long de la guerre, ce qui représenta approximativement 19,000 combattants fidèles à la Couronne. Par ailleurs, les conditions inhérentes aux champs de bataille démontrèrent que chaque camp, et notamment chez les Britanniques, fut mal équipé et surtout mal entraîné pour la lutte qui s’annonça. Si la tenue vestimentaire et les tactiques britanniques « à l’européenne » révélèrent rapidement leur inefficacité, l’amélioration du ravitaillement combinée à l’évolution graduelle des tactiques alla transformer le soldat britannique de ligne en un combattant beaucoup mieux adapté à l’environnement plus rustique de l’Amérique du Nord.

Le 2 juillet 1776, soit deux jours avant que le Second Congrès continental ne vote pour le texte final de la déclaration d’indépendance, le général Howe débarqua l’avant-garde de son armée sur Staten Island (New York). Son plan stratégique pour l’année 1776 consista à reprendre la ville de New York et isoler la Nouvelle-Angleterre du reste des colonies en rébellion. C’est alors que le Congrès ordonna à Washington de défendre le plus important port américain, New York. Dans cette aventure, les forces américaines inexpérimentées de Washington furent vaincues à la bataille de Brooklyn Heights (Long Island) le 17 août 1776, ce qui força celles-ci à se replier vers Manhattan. À nouveau battu à Harlem Heights et White Plains (octobre), Washington retraversa le fleuve Hudson, abandonnant ainsi New York. Cette difficile année 1776 pour les Américains s’acheva par deux autres défaites où les Britanniques reprirent Fort Washington et Fort Lee, les deux derniers points fortifiés stratégiques sous contrôle rebelle (novembre). Howe avait obtenu ce qu’il voulait, soit l’occupation de New York par ses troupes, qui conserveront cette ville jusqu’à la fin des hostilités.

Le Congrès vote la déclaration d'indépendance le 4 juillet 1776.

En dépit de ses victoires, Howe sut que Washington n’était pas totalement vaincu et le général britannique amorça la poursuite des forces rebelles à travers le New Jersey, mais il ne parvint pas à livrer immédiatement une bataille d’envergure qui aurait été décisive. Howe crut justifié de maintenir au New Jersey l’équivalent d’une brigade pour ainsi pacifier la région politiquement et encourager le support loyaliste latent. Cependant, deux victoires mineures obtenues par l’isolement astucieux des garnisons britanniques à Trenton et Princeton (décembre 1776 – janvier 1777) contribuèrent à relever le moral des patriotes et, plus important dans l’immédiat, forcer Howe à évacuer le New Jersey. Cet épisode de prise et reprise de territoires avait entraîné à sa suite une série d’émeutes frôlant la guerre civile, ce qui sera somme toute un phénomène récurrent dans d’autres théâtres d’opérations de la guerre d’indépendance.

Dans un autre ordre d’idées, et pour terminer sur cette première phase de la campagne militaire, Washington persuada le Congrès de lever une véritable armée professionnelle. Il s’agissait de l’Armée Continentale, une force composée de 67,000 hommes qui s’enrôlaient pour une période de trois ans et qui étaient répartis dans 83 régiments ou bataillons tous levés et entretenus aux frais des États. Ces régiments, qui formaient la Ligne Continentale, seraient les véritables porteurs de la Révolution. Sous les ordres de Washington, ils allaient affronter l’armée britannique, mais le commandant américain éviterait autant que possible l’affrontement à grande échelle, sauf si les circonstances politiques ou militaires le lui imposaient, préférant du coup épuiser la volonté des Britanniques de poursuivre la guerre.

Pour avoir une chance de l'emporter face aux soldats réguliers de l'armée britannique, les membres du Congrès réalisèrent qu'il fallait créer un instrument militaire qui soit aussi professionnel, entraîné et équipé. Ainsi était née l'Armée Continentale.

Alors que l’histoire démontre qu’une majorité de combattants américains préféra faire la guerre au sein d’unités de milice, dont le temps de service était moins long (au grand déplaisir de Washington), il appert que tant les unités miliciennes que celles de l’Armée Continentale contribuèrent à la victoire en se supportant régulièrement sur le terrain. L’Armée Continentale livrerait une guerre classique, alors que la milice opterait pour le style de la guérilla, à la suite de défaites subies par les réguliers, si bien que les miliciens menaceraient constamment les communications de l’ennemi. Alors que la guerre prit de l’ampleur, il devenait évident aux yeux des Britanniques que la terreur et l’extermination deviendraient des recours jugés nécessaires. Cette approche ne plaisait pas à Howe, mais son emploi se révèlerait impératif si les flammes de la révolution ne pouvaient être éteintes à terme.

Les campagnes de Philadelphie et de Saratoga (1777-1778)

Le chef d'état-major de l'Armée Continentale et premier Président des États-Unis, George Washington.

La décision du Second Congrès continental de déclarer l’indépendance des colonies en juillet 1776 transforma la guerre du tout au tout. Alors que les nouveaux États ayant autoproclamé leur indépendance travaillaient à élaborer leurs constitutions respectives, l’armée de Washington, qui représentait alors une petite force ignorée et mal ravitaillée, luttait pour sa propre survie face à un ennemi déterminé. Conséquemment, au cours de la campagne militaire de 1777, Washington se vit contraint de réagir aux mouvements de l’ennemi plutôt que d’entreprendre des actions proactives. De leur côté, les généraux britanniques souhaitèrent étendre leur plan de campagne amorcé l’année précédente, mais leurs performances sur le terrain en 1777 furent si mauvaises qu’ils gaspillèrent probablement leur dernière chance de remporter la guerre. Le général Howe tint peu compte, entre autres choses, des développements militaires au sud et préféra donc concentrer ses efforts au nord, toujours dans l’espoir de délivrer à l’armée de Washington un coup qui lui serait fatal.

Le plan stratégique d’ensemble du général Howe, mis à jour en novembre 1776, demandait davantage de renforts auprès de Lord George Germain, le secrétaire d’État pour le Département de l’Amérique. En effet, Howe jugeait avoir besoin de 10,000 hommes pour reprendre Albany (New York) aux mains de l’ennemi, en plus d’envoyer un autre contingent de 10,000 soldats pour reprendre Providence (Rhode Island) et Boston. À cela, le commandant britannique comptait sur une force non négligeable de soldats réguliers et de miliciens loyalistes afin de tenir New York, car son intention finale était de constituer une autre force dont l’objectif serait d’envahir la Pennsylvanie et capturer la capitale fédérale de Philadelphie. Le secrétaire Germain endossa ce plan ambitieux, mais il ignora la requête de Howe pour des renforts. De plus, Germain accepta un plan stratégique alternatif élaboré par le général Burgoyne visant à envahir l’État de New York à partir du Canada, prendre Albany et établir la liaison avec les forces de Howe qui marchaient au nord dans le but d’isoler à nouveau la Nouvelle-Angleterre du restant des colonies rebelles.

Comme nous l’avons mentionné, et ce, dès le début des hostilités, la stratégie britannique semblait vouée à l’échec. En rétrospective, celle-ci était basée sur la notion d’une guerre « eurocentriste », qui comprenait ces idées de fronts militaires, de points stratégiques et l’utilisation classique de lignes intérieures (pour les déplacements et les ravitaillements) qui n’existaient pas en Amérique, ou du moins très peu. Même s’il avait été un succès, le plan britannique n’aurait pas pu asséner un coup mortel à la rébellion. La raison étant que les Britanniques n’avaient pas pris en compte la capacité du Congrès de levée une seconde armée pour faire campagne au nord, c’est-à-dire une force aux effectifs encore plus larges que l’armée de Washington.

Le plan britannique perdit davantage de son mordant lorsque Howe prit la décision de ne pas faire mouvement vers le nord au début de 1777, un mouvement qui, rappelons-le, était nécessaire afin d’appuyer Burgoyne qui débouchait du Canada. Howe était d’avis que l’appui à la cause patriote était en train de s’effondrer dans nombre de colonies, ce qui l’amena à concentrer ses efforts à prendre Philadelphie, mettre le Congrès en déroute et rallier le support loyaliste en Pennsylvanie. Howe décida donc de replier ses forces du New Jersey, puis de tenter une invasion par la mer, toujours en vue de prendre Philadelphie. Cependant, le mauvais temps joua contre lui et ses troupes ne purent arriver à l’embouchure de la baie de Chesapeake avant le 25 août 1777, à quelque 80 kilomètres au sud-ouest de Philadelphie. Ce faisant, Washington avait anticipé la manœuvre et il décida d’éloigner sagement son armée de la baie puis de l’installer sur les hauteurs, à Chad’s Ford sur la crête de Brandywine, où la bataille s’engagea le 11 septembre.

Représentation de la bataille de Brandywine du 11 septembre 1777. Au cours de cet engagement, les forces de Washington commirent des erreurs tactiques que les Britanniques ne tardèrent pas à exploiter pour y remporter une victoire majeure, laissant ainsi la capitale américaine de Philadelphie sans défense.

En dépit d’un pronostic intéressant pour les Américains, ceux-ci furent pris de flanc par les troupes de Lord Cornwallis, ce qui força Washington à se replier dans un relatif désordre, avant d’être à nouveau battu à Paoli (Pennsylvanie) le 20 septembre. Cette dernière défaite obligea le Congrès à évacuer Philadelphie pour se réfugier à Chester, alors que Washington, qui refusa d’admettre ses défaites, attaqua à nouveau les Britanniques à Germantown le 3 octobre. Au cours d’un assaut confus mené en pleine nuit, ses généraux ne parvinrent pas à coordonner leurs manœuvres et une autre défaite s’ensuit. Ces récents événements rendirent le Congrès de plus en plus critique à l’égard des aptitudes de Washington à commander, où on se plaisait à le comparer défavorablement au général Horatio Gates, le commandant des forces américaines au nord des colonies. Pour sa part, Howe parvint à prendre Philadelphie, mais sur le long terme, ce succès ne fit guère de différence sur l’issue de la guerre.

Plus au nord, Burgoyne amorça sa marche le long du Lac Champlain en juin 1777, avec un contingent hétéroclite composé de réguliers britanniques, de mercenaires hessois, de loyalistes, d’Amérindiens et quelques miliciens canadiens. Le 5 juillet, cette force de 7,000 hommes contraignit les Américains, sous les ordres du général Arthur St. Clair, à évacuer Fort Ticonderoga avant de les poursuivre vers le sud jusqu’à Fort Edward sur l’Hudson. À l’ouest, cependant, la seconde colonne britannique partie du Canada, sous les ordres du colonel Barry St. Ledger, qui incluait 1,000 Iroquois dirigés par Joseph Brant, connut davantage d’ennuis logistiques qui ralentirent sérieusement la marche. Ayant pu vaincre les miliciens new-yorkais du général Herkimer, St. Ledger fut retenu par le siège de Fort Schuyler (New York) puis ses hommes furent battus à Oriskany le 8 août.

La défaite de la seconde colonne britannique eut une conséquence sur l’ensemble des opérations que menait le général Burgoyne dans la colonie de New York. En fait, les troupes de Burgoyne se trouvèrent isolées en pleine contrée sauvage. Au lieu de rentrer au Canada, Burgoyne poursuivit sa marche en territoire ennemi, où ses alliés amérindiens commirent des atrocités qui ne tardèrent pas à soulever la population locale contre lui, sans compter la défaite qu’il subit face à la milice du New Hampshire lors de la bataille de Bennington (Vermont) le 22 août. Toujours déterminé à marcher plein sud, Burgoyne prit le risque de rompre ses propres lignes de communication et de traverser l’Hudson. Ce dernier mouvement fut fatal à son armée, car cette campagne dite de Saratoga se solda par une défaite à Freeman’s Farm (19 septembre) et à Bemis Heights (7 octobre). Battus, Burgoyne et son armée capitulèrent.

(La suite dans la seconde partie de cet article.)